VINAIGRE DISTILLÉ

On rencontre, en alchimie, très souvent l’usage du fameux « vinaigre distillé ». C’est un des « menstra » qui permet de faire un lien entre le végétal et le minéral ; on l’utilise dans la voie des acétates et il conduit aux teintures métalliques.
Les premiers, les Arabes affirmèrent que les propriétés actives des plantes ne résidaient pas dans la plante toute entière, mais dans certains de ses organes. Dès le huitième siècle, Géber distillait le vinaigre.Si vous suivez la tradition, vous devez faire votre vinaigre à partir d’un « bon vin ». Nous devons souligner ici que bon vin signifiait à l’époque un vin que nous qualifierions aujourd’hui de « BIO », mais qui ne titrait au mieux, avant l’invention de la chaptalisation, que 8°. L’acide acétique composant (avec l’eau) du vinaigre, existe tout formé à l’état d’acétate de potassium, de sodium ou de calcium dans la sève de presque toutes les plantes.

Il se forme lors de la distillation sèche d’un grand nombre de substances organiques, (bois, amidon …).
Dans la formation du vinaigre, il y a oxydation de l’alcool contenu dans le vin, la bière, le cidre etc., au contact de l’air et d’un bacille (mycoderma aceti), qui développe une pellicule (mère de vinaigre) à la surface des liquides alcooliques. Il est à remarquer que si son action se prolonge alors qu’il n’y a plus d’alcool, l’activité du mycoderme détermine l’oxydation de l’acide acétique lui-même, et sa transformation en eau et gaz carbonique ; donc, ce point est à surveiller.

Méthode plus rapide et plus économique, acheter du vinaigre de vin rouge ordinaire, (Bio si possible mais, exclure tout vinaigre d’alcool, coloré ou non). Il vous faut voir grand et tabler sur 20 litres au minimum de ce vinaigre. Si vous ne désirez travailler que sur le métallique (acétates), vous pouvez trouver en grande surface du vinaigre ménager titrant 14° et contenant un peu moins de 15 % d’acide acétique.

Pour réduire le volume à distiller nous allons utiliser la congélation. Cette méthode est très connue, mais nous l’avons améliorée au fil des ans.Première étape : Il vous faut disposer d’un congélateur et non d’un conservateur (heureusement, ce type d’équipement est de plus en plus présent dans les ménages, même sous forme d’un simple compartiment séparé du réfrigérateur).

– 1e – Placer le thermostat en position moyenne (conservateur à – 20°C.).

– 2e – Retirer environ 1/4 du liquide de chacune des bouteilles pouvant prendre place dans le compartiment et les y placer de façon à ce que le goulot soit dégagé et dirigé vers le haut.

– 3e – Laisser congeler 24 heures.

– 4e – Retirer les bouteilles et les placer la tête en bas au-dessus d’un récipient pendant environ trois heures, le temps de laisser s’écouler tout le liquide coloré. Il s’écoule un temps mort entre l’écoulement de ce vinaigre et celui de la « fraction eau », ce qui permet de ne pas se tromper.

– 5e – Traiter ainsi tout votre vinaigre et débarrassez-vous sans remords de la partie congelée à peine colorée qui est restée dans les bouteilles.

Nota : Lors d’une de ces opérations, nous avons récupéré 14 litres sur 25 litres au départ.

Deuxième étape

(plus longue, mais sur un volume déjà moins important).

– 1e – Placer le thermostat au maximum (congélation à – 38°C) et attendre 48 heures à vide.

– 2e – Remplir aux 3/4 vos bouteilles et les placer de la même façon dans le congélateur.

– 3e – Attendre cette fois 48 heures avant de les retirer et de les laisser s’égoutter comme la première fois pendant trois heures.

Nota : A la fin de cette étape, nous avons retiré (des 14 litres précédents), 6,5 litres.

Troisième étape

La distillation lente, ne pas oublier les indispensables pierres à distiller, de simples fragments d’une pierre ponce (vendue en pharmacie) servant à éviter la création de grosses bulles de caléfaction, génératrices d’incidents parfois graves.

En principe, c’est l’eau qui passe en premier, mais si vous respectez les températures et les temps indiqués au congélateur, tout ce qui passe peut être gardé.
En effet, cette manière d’opérer en deux temps que nous avons peaufinée donne directement un vinaigre de pH inférieur à 3 (après mélange de toutes les fractions distillées). Cette opération ne sert donc qu’à éliminer la partie colorée, et à ne garder qu’un mélange d’eau et d’acide acétique.

A ce propos, on rencontre parfois chez les Anciens une mise en garde qui laisse rêveur, « veillez à ce que votre vinaigre distillé ne contienne aucune trace d’acide acétique », nous pensons que cette remarque concerne l’acide acétique glacial obtenu à partir d’un acétate et qui est de ce fait orienté uniquement vers le métallique.
Uniquement si vous travaillez sur du vinaigre de votre fabrication : il passe en premier un mélange de vinaigre fort et de soufres végétaux colorés, (qui semblent avoir été éliminés lors de l’élaboration du produit industriel). Il convient donc dans ce cas, de tirer à part cette fraction colorée en jaune pâle, qui, réduite par un deuxième passage, reste utilisable sur le métallique.

La distillation sera stoppée dès que le vinaigre sortant de l’alambic se colore très légèrement (une dernière distillation le rendra comme du cristal). Il convient vers la fin de faire la récupération du vinaigre par fractions de 50 ml., pour ne pas risquer de colorer tout le stock. Le résidu pourra éventuellement être calciné (à l’extérieur) pour en tirer un tartre analogue à celui des tonneaux, et sur lequel certains cohobent leur vinaigre.

Nota : Sur 25 litres de vinaigre du commerce nous avons récupéré en final 6 litres à pH 2,6.

Mise en garde

Vous aurez, dès le début, compris par vous-même, qu’il faut impérativement protéger vos voies respiratoires et vos yeux.

L’acide acétique, (ou ce vinaigre s’il très concentré) nécrose la peau plus que n’importe quel autre acide, les brûlures sont très longues à cicatriser et les pieds (souvent exposés en cas de chute de gouttes ou de bris de contenant) doivent comme les mains être impérativement mis à l’abri avant l’incident pourtant souvent jugé à tort improbable.

A. Saitik

Alchimie pratique.

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NOTE

L’article précédent appelle une remarque : les compartiments congélateurs comme tous les produits consommateurs d’énergie sont depuis quelques années soumis à des normes, et suivant le nombre d’étoiles ambitionnées produisent le froid juste suffisant avec la plus basse dépense d’énergie possible.
En conséquence, si vous disposez d’un réfrigérateur moderne, même à deux compresseurs, vous devrez vous contenter de – 20 à – 25 ° C.
Il s’agit pourtant d’un faux problème d’économie, car la congélation rapide se faisait avec un froid maxi pendant 48 heures, puis le froid était ramené à – 18 pour la conservation, ce qui permettait de traiter des masses plus importantes dans de bien meilleures conditions de conservation.

L’association ayant rencontré ce problème de frigo moderne a opéré comme ci-après.

Première étape :

A – 18° pendant 72 heures, quand le vinaigre est pris en bloc (environ après 24 heures), coucher les bouteilles pour que le contact avec la surface génératrice de froid du frigo soit le meilleur possible.

Récupération à partir de 20 litres de vinaigre de vin à 6° : 8 litres 90 après écoulement pendant 6 heures.
Nota : ce vinaigre à bas prix a laissé en fin d’écoulement un dépôt blanchâtre comme on en voit parfois dans l’alcool à 90° de pharmacie, preuve qu’une partie de l’eau a été retirée par un produit absorbant genre carbonate de potasse.

Deuxième étape

Au maxi, pour nous – 22 pendant 72 heures etc. comme ci-dessus.
Récupération après un écoulement pendant 3 heures 30 : 4 litres 80.
Nota : lors de la distillation (en deux fois pour rester en dessous de ½ de la capacité du ballon à cause des projections) pour retirer la couleur, le vinaigre a été recueilli en 10 flacons numérotés, de façon à obtenir par mélange ultérieur une plus petite quantité, mais de pH maîtrisé.

Non prévues à l’origine pour publication, les notes n’ont pas toutes été conservées. Nous avons tout de même retrouvé quelques photographies.

Le nettoyage se fait par macération prolongée dans de l’eau de javel.