Du PARAMAGNÉTISME de la matière philosophale.

ou du traitement de l’Antimoine en préalable.
S’il est une évidence que l’étudiant doit constamment garder à l’esprit c’est bien le fait que notre bon maître de Savignies n’enseigna jamais dans ses écrits la totalité des opérations de laboratoire.
Pour bien s’en assurer, il suffit de se reporter à la page 23 des « Considérations Liminaires » de l’Alchimie expliquée sur ses textes classiques.(Jean-Jacques Pauvert, éd. 1988). Cela s’applique, dès le début, lors du traitement de l’antimoine qui, séparé de sa gangue, est un tri-sulfure d’antimoine alors que la substance intensément brune, qui est soumise à l’assation, est un oxysulfure qui ne doit pas rester commun, quoique naturel ; (cf. La Tourbe N°14) et dans un article précédent (N° 7 de la même revue)  » … une poudre intensément brune exaltée qu’elle était par la digestion douce et longuement entretenue (…) non seulement il importe que cette matière soit d’origine naturelle, mais aussi que la vie se réveille en elle doucement, afin qu’elle devienne l’antimoine des philosophes. »
Nous pouvons affirmer que le sulfure d’antimoine purifié, soumis à une assation de quelques 54 jours et nuits en respectant les phases lunaires, les températures adéquates et la période printanière, ne prendra jamais cette couleur brune qui se rapproche de celle de l’épagneul breton. Cette absence de résultat quant à la couleur n’avait pas échappé à deux auteurs de la Tourbe, Messieurs R. Selva et Erbet, dont les articles fouillés et minutieux seraient à reprendre, compte tenu de leur grande qualité.
En substance, il faudra donc obtenir un oxysulfure de couleur brune en partant d’un tri-sulfure, et ce par une opération combinant la voie humide et la voie sèche selon les indications d’Eugène Canseliet lui-même.
Ainsi, peut-on lire dans Alchimie (Jean-Jacque Pauvert, éd. 1978, introduction page 19) :
« … Saint Jean-Baptiste évoqua les deux purifications immenses ou si l’on préfère, le double baptême du globe tout entier ». Ce double baptême, se faisant par l’eau et le feu – en n’oubliant pas que le feu est salé – nous ramène comme il se doit à la formation hydrothermale de la kermésite naturelle dont le chêne kermès est à mémoriser avec discernement.
Une fois acquis notre sulfure, il devra encore subir une exposition assez longue, aux influences célestes dont, avant le chancelier d’Hermès, un auteur disserta longuement et d’une façon limpide et charitable, nous citerons Sabine Stuart de Chevalier. Mais revenons au baptême par l’eau au sujet duquel Basile Valentin dans son « Char triomphal » fournira une relation explicite permettant une excellente introduction. Notre auteur y soumet l’antimoine en poudre fine, mise dans un ballon rempli pour moitié d’eau de pluie distillée, puis luté et soumis au feu humide du ventre de cheval,donc vers 65° (température du fumier). Il s’agit de continuer jusqu’au bouillonnement de la matière puis d’ôter l’écume qui s’est sublimée. Ce signe prouve que l’antimoine s’est ouvert.
Nous invitons l’étudiant à ne pas outrepasser ce stade, seul propice aux opérations ultérieures … Sans trop dépasser cette expérience spagyrique, nous pourrions toujours en accélérer le processus : – en y introduisant un oxydant salin, par exemple un sel alkali obtenu en partant de ce que les anciens essayeurs tel Schlutter dans son Traité de la Fonte des Mines dénommait le « Flux Blanc », qui s’obtenait en calcinant deux parties égales de tartre en crème et de nitre. – En prenant garde de maintenir et de renouveler dans le ballon un suffisant volume d’air pour entretenir l’oxydation, ainsi que la température adéquate, juste en dessous de l’ébullition, donc vers 90°.
Dans d’autres parties du premier œuvre, d’apparentes contradictions d’Eugène Canseliet dissimulent en fait des indices voilés sur des opérations absentes. Citons « cette poudre érugineuse et grasse et peut-être isotope du colcotar ; en tout cas fort semblable au sesquioxyde qu’on appelle aujourd’hui oxyde ferrique. » Or érugineuse n’est pas un adjectif attribué à un oxyde ferrique mais à un oxyde de cuivre, couleur vert-de-gris, alors que le colcotar est rouge. Cette indication est à rapprocher de l’homme double igné de Basile Valentin et des précisions apportées par Fulcanelli dans ses « Demeures » sur le soufre double … Que dire encore des 3 mariages de Perrenelle symbolisant, pour Eugène Canseliet, les trois mariages de l’antimoine ; des 3 ou 4 clous qui suivent d’assez près (mais pas trop) une des 2 conjonctions du premier œuvre et fournissent le Vitryol ou Émeraude des Sages, qu’il faut bien distinguer d’avec le Lion Vert, puis ce dernier d’avec le Lion Rouge … Car celui qui obtient le Lion Rouge en lieu et place du Lion Vert dans le premier œuvre commet une erreur par omission.
Que dire des Aigles qui fournissent à la fois les nourritures blanches et jaunes, le Mercure des Philosophes, et enfin les dix petites remores qu’il conviendra de réunir en vue de l’éclosion de l’unique Remore – tout en ayant à l’esprit que le premier œuvre fournit lui aussi sa remore ou plutôt deux remores(les deux jumeaux hermétiques) qu’il faudra réunir en une seule par le cadavre de la Salamandre – sans omettre qu’entre dans la première conjonction au mariage, une pointe de fer selon que l’enseigna Fulcanelli.
Et doit-on en déduire qu’outre l’antimoine un autre corps minéral ou métallique entre également d’une façon pondérable, conjointement au fer … Symboliquement à rapprocher des deux tours des cathédrales gothiques dont l’une est plus haute que l’autre, sachant que la tour est l’image du soufre métallique. Il faudrait aussi revenir un instant sur l’enrichissement des sels de rosée, qui est différent de l’enrichissement des sels par leurs homologues célestes, ce qui implique une séparation des principes salins de la Rosée, mais conservés dans leur distillat propre …
Comme on peut en juger, le Grand Œuvre ici débute … Sans oublier Foi, Courage, Patience et Chevalerie.

Ancy-Lefranc.