LE MILLEPERTUIS.

 

      Le millepertuis commun, (Hypericum perforatum) connu depuis l’Antiquité sous diverses appellations (Herbe de la Saint-Jean, herbe aux piqûres, chasse-diable, faux-lin, herbe percée, herbe aux mille trous et bien d’autres), est utilisé depuis des millénaires pour guérir de nombreuses maladies. Au-delà des superstitions, la médecine moderne (à partir du XX me siècle) a, par l’analyse de ses constituants, confirmé un grand nombre de ses effets bénéfiques.
Il existe dans le commerce et bien entendu en pharmacie un large éventail de produits sous diverses présentations : gélules, thés, teintures-mère, huile essentielle, etc. Ces médications sont souvent en vente libre. Son utilisation médicale en interne, (sur ordonnance) la plus répandue est liée à la lute contre la dépression et aux maladies connexes.

La plante :
Elle doit son nom au fait que les feuilles regardées par transparence semblent perforées d’une multitude de minuscules trous. En réalité, il s’agit uniquement de zones translucides composées de glandes à essence. C’est une plante vivace de 30 cm à 80 cm de haut qui donne une belle floraison jaune décorative, de juin à septembre (suivant les régions). Les pétales des fleurs flétrissant dès le lendemain prennent une teinte beaucoup plus foncée[Images 1 à 4].

      C’est une plante de culture facile, même en pot, qui peut être faite par semis (les graines se trouvent en jardinerie) ou par bouturage au printemps ou à l’automne. Ceci pour ne pas avoir à en faire la cueillette dans des endroits à la pollution incertaine. Elle a un seul inconvénient : utilisée à dose élevée, elle photo-sensibilise la peau, et en cas d’exposition prolongée au soleil peut être cause de démangeaisons chez les humains (et les animaux paissant dans des prairies qui en contiennent trop). La plante n’est pas toxique et on signale même parfois la dégustation de ses feuilles en salade.

Médication :
Pour la plus grande partie de ses utilisations médicales, seul le médecin est compétant. Pour les usages tels que les tisanes contre la bronchite par exemple, les produits disponibles en vente libre dans les pharmacies sont munis d’un mode d’emploi. La littérature abondante concernant cette huile miracle la préconise en cas d’hémorragie, de furoncles, de plaies purulentes, de piqûres d’insectes, de luxations, d’entorses et bien d’autres dont l’apaisement de la douleur d’une brûlure.
Je ne parlerai donc, suite à une expérience de plus de 40 ans, que d’usage externe limité aux petits incidents de la pratique alchimique.
Les alchimistes travaillant au fourneau ont (malgré les gants) de multiples occasions de se faire de petites blessures et brûlures. C’est à ce moment qu’il est précieux de pouvoir disposer immédiatement, à portée de main, d’un peu d’huile de millepertuis.
Elle ne remplace pas bien entendu le service des urgences en cas de brûlure profonde ou étendue.
Je ne la conseille que pour activer la cicatrisation et soulager la douleur des petits bobos, contusions, coupures, ou les légères brûlures qui laissent la peau comme cirée après avoir pris en main trop rapidement un régule par exemple, (cette dernière remarque, en clin d’œil souvenir, à quelques stagiaires ayant quitté leurs gants trop tôt). L’utilisation proposée s’applique surtout à ces petites blessures que l’on néglige, souvent bien à tort.
Lors de la réalisation de l’huile de millepertuis, dont il sera question par la suite, il faut n’utiliser que la fleur très fraîchement cueillie et dépourvue de sa partie verte.

Fabrication :
C’est une opération qui peut être d’un bout à l’autre confiée à un enfant, depuis la cueillette, l’adjonction d’huile (de lin dans le cas des images qui suivent) la surveillance de la macération et la filtration finale [images 5 à 8].

      Contrairement aux images présentées ci-dessus, je conseille pour ma part de ne faire qu’une petite quantité d’huile de millepertuis à la fois. On n’en consomme tout de même qu’une faible quantité par an, et il vaut mieux en faire de la fraîche tous les 5 ans par exemple. 
On récolte donc 5 à 10 fleurs écloses du matin et cueillies dès leur éclosion. On les dispose au fond d’une coupelle en les meurtrissant légèrement pour qu’elles n’occupent qu’un faible volume, on ajoute uniquement la quantité d’huile, (olive, amande douce, lin etc.) suffisante pour les recouvrir entièrement.
On couvre la coupelle d’un film perforé transparent ou d’une étamine (pour éviter les insectes) et on expose le tout au soleil. Il faut penser à soustraire la préparation à l’humidité de l’air, surtout à la rosée nocturne, car l’huile aspire l’humidité ce qui est préjudiciable à sa conservation.
Il existe de nombreuses autres façons de pratiquer, certaines allant jusqu’à ajouter du vin blanc, mais il faut ensuite passer par une distillation pour retirer l’eau.
Notre coupelle sera donc régulièrement exposée au soleil pendant 30 à 40 jours, l’huile prendra finalement une belle teinte rouge. Il ne restera plus qu’à la filtrer sur un peu de coton [image 9] et à la loger dans des flacons colorés et bien bouchés pour une longue conservation [image 10].
      Ce petit exercice sans prétention vous obligera tout de même à penser journellement que vous avez une préparation en cours à surveiller (en retournant régulièrement la plante dans son huile une ou deux fois par semaine). C’est une opération de spagirie dont ceux qui travaillent sur des voies métalliques ne devraient pas s’exempter.

Paul Melleret : pour Les amis de l’alchimie.