STAGE DE TRAVAIL SUR LES PLANTES I

Cet article fait suite à un stage réalisé à partir du romarin, mais
n’est qu’un exemple applicable à presque tous les végétaux.
      Le romarin [image 1] est choisi de préférence au moment du début de sa floraison et récolté au lever du soleil, lavé rapidement en eau de source et placé à l’ombre.
La partie que nous avons utilisée est la hampe fleurie avec son bois limité au diamètre de 1 cm environ pour des raisons de facilité. Nous avons réservé une partie des « aiguilles » de la plante pour les opérations exigeant de la plante broyée.
Pour un usage spécifique d’une plante donnée, il est impératif de connaître les parties à prélever pour leurs vertus et celles, au contraire, toxiques à rejeter. Nous n’entrerons jamais dans ces détails, et ceux de doses, qui nous conduiraient à parler illégalement en pharmacien.

Conditions préalables à l’organisation d’un stage limité dans le temps : 
Le romarin destiné à être traité à sec a été récolté, coupé en fragments de 2 cm de longueur et séché totalement en étuve sans dépasser 60° C. Pour le stage, il n’a pas séjourné en dessiccateur, avec absorbant (gel de silice coloré genre Silicagel) mais a été stocké encore chaud en bocal étanche.
L’alcool philosophique de vin à 100° théoriquement requis a été remplacé par de l’alcool blanc pour fruits à 40° porté hors stage à 96°.

Les expérimentations qui suivent s’appliquent de façon générale aux plantes que vous choisirez pour les raisons qui seront les vôtres : obtention de parfum, médication interne ou externe que vous aurez décidé de réaliser, ou tout simplement maîtrise d’opérations de laboratoire à caractère formateur.

Extraction hydraulique de l’huile essentielle de romarin : (Hydro distillation).

Pour ne pas devoir tout réécrire, nous vous invitons à relire l’article « Extraction du soufre des plantes » dans « articles » « 2005 ».

Les stagiaires coupent des rameaux de plante avec la partie ligneuse limitée à 1 cm de diamètre. Ces rameaux (rincés et sans coccinelle) sont débités en morceaux d’environ 2 cm de long. Le réacteur de 6 litres en contient 1 kg. On ajoute 4 litres d’eau de pluie filtrée, et on s’assure, en tassant légèrement, que des fragments de plante ne risquent pas de monter dans le col du réacteur et de produire une obstruction.
On place le couvercle du réacteur (joint très légèrement enduit de graisse silicone) et on raccorde le séparateur d’huile [image 2] surmonté de son condenseur à reflux. On met ensuite en chauffe jusqu’à ébullition de l’eau.

      L’opération déjà décrite consiste à récupérer l’HE qui surnage l’eau dans le séparateur grâce au montage très simple [image 3], puis de carboniser au blanc la plante épuisée pour ensuite tirer la cendre. 

Discussion :
On utilise un réacteur de gros volume, car le rendement en huile essentielle (HE) étant très faible, (pour la rose, par exemple, le rendement en HE est de 4 000 à 10 000 fois plus faible que le poids des pétales utilisés). On a tout intérêt à travailler sur une quantité non négligeable pour réduire le nombre de cycles d’extraction. Si on utilise un ballon dont le col ne permet pas de passer la main, il sera indispensable de couper la plante en fragments beaucoup plus petits pour pouvoir la ressortir sans trop de peine ultérieurement avec un crochet en fil de fer. Moins pratique, cette solution n’est cependant pas de nature à interdire ce travail à un débutant, forcément limité par le coût de l’équipement. Par contre, il peut plus facilement disposer de deux ballons et se contenter de transvaser l’eau (en complétant le volume manquant) pour reprendre sans délais l’extraction. Nous avons, dans l’article de 2005, parlé de l’utilisation possible d’une cocotte-minute.
On utilise un séparateur d’huile, dérivé d’un Dean Stark du commerce, [image 4] mais présentant sur ce dernier un avantage considérable. Nous sommes obligés de faire réaliser nos séparateurs par un verrier, quand nous avons accumulé suffisamment de demandes de nos membres pour pouvoir obtenir un prix acceptable.
L’avantage déterminant du séparateur réside dans sa faculté de retourner au réacteur (ou à la cocotte), l’eau provenant de la condensation de la vapeur. En effet, grâce à ce travail en circuit fermé de l’eau baignant la plante, il n’y a plus de risque de brûler cette dernière au fond du réacteur.
Par contre, dans le cas de l’utilisation en circuit ouvert, il faut récupérer cette eau à la sortie du vase florentin ou du décanteur, ce qui oblige à exercer une surveillance constante. Cette eau doit impérativement être remise dans le réacteur (ballon ou cocotte) dès qu’il en est sorti environ 20 %, ce qui oblige à baisser périodiquement le chauffage pour ouvrir. Le séparateur d’huile permet, au contraire, un fonctionnement autonome d’une dizaine d’heures, plus que suffisant pour épuiser la plante.
Cette faculté de fonctionnement, avec une surveillance très réduite, nous a permis en parallèle de brûler [image 5] une quantité importante, préalablement séchée, de romarin et d’en obtenir la cendre ; de concentrer du vinaigre par le froid ; de faire de la liquation de stibine et de faire, (nous aurons l’occasion d’en reparler), de l’extraction alcoolique du soufre de romarin au soxhlet. Le temps ainsi libéré par l’utilisation du séparateur d’huile nous pousse à en recommander l’usage.
La seule quantité d’eau éventuellement retirée au circuit est celle qui est surmontée par l’HE dans le séparateur. On peut, en général, tenir une journée sans avoir à vidanger l’HE, donc cette petite quantité d’eau qui l’accompagne.

Obtention de la cendre, dite blanche :
A la fin d’un cycle d’extraction, constaté par le fait que le niveau d’HE récupérée dans le séparateur ne change plus, on débranche et on ouvre le réacteur (ou le récipient utilisé comme cucurbite), on vide l’eau encore chaude et on récupère la plante, on la remplace rapidement par de la fraîche, on remet cette eau chaude, on complète le niveau pour compenser celle imbibant encore la plante retirée (dans notre cas environ un litre). Cette opération ne prend que 2 minutes et permet la remise en route en perdant le moins possible de calories.
La plante, une fois refroidie, est pressée (dans un linge tordu par exemple) et l’eau colorée mise de côté pour le prochain complément de remplissage. A la fin des opérations, l’eau de la cucurbite est évaporée à sec puis le dépôt joint à la plante pour être brûlé. 
La plante est séchée en étuve à 120° C puis brûlée [images 6 & 7] (inflammation avec un peu d’alcool à brûler). Le feu risquant de propager des débris enflammés, on utilise un grillage de préférence inox pour recouvrir le foyer. La cendre noire en résultant est écrasée au mortier, et carbonisée de nouveau dans un plat inox (ici une simple poêle en tôle) sur un feu vif.
      A ce stade, elle doit être gris clair et passer facilement au travers d’un tamis fin [image 8] après un éventuel passage au mortier.
Pour ceux qui en sont équipés et peuvent assumer le risque d’un divorce pour « incompatibilité d’odeur », un passage dans le four à pyrolyse du ménage à 500 ° C. permet un meilleur résultat [image 9]. Les puristes tenteront, en une douzaine d’heures de calcination, de parfaire la blancheur de leur cendre, voire de la pousser au rose clair. Pour notre part, nous n’avons jamais constaté un rendement en sel significativement supérieur justifiant ce travail.
      Le but recherché, obtenir une HE, est atteint en effectuant l’extraction jusqu’à la fin du stage pour en retirer le maximum.
Nous ne disposons plus du temps nécessaire pour purifier cette HE. En outre, les stagiaires se la partageant en souvenir, la quantité individuelle est trop faible pour qu’ils puissent chacun envisager une purification.
Si la quantité accumulée est plus importante, il faut l’allonger d’eau pure, secouer énergiquement, laisser décanter [image 10], vidanger l’eau, la remplacer et refaire cette opération au moins une fois.
Quand on a suffisamment d’HE, on peut distiller lentement cette réserve (allongée d’eau pure).
L’alcool dissolvant l’HE et non pas les impuretés [image 11 gauche], une décantation permet de les retirer s’il en reste.
Pour retrouver votre HE, l’ajout d’eau qui s’empare de l’alcool permet de libérer l’HE qui surnage [image 11 droite]. Cette eau alcoolisée garde cependant une faible proportion de votre huile et peut être conservée pour parfumer.
Préparation d’un élixir :
L’opération débute hors stage par une mise en macération de la plante très sèche (chaude au sortir de l’étuve) en très petits fragments dans de l’alcool philosophique (alcool à 100° provenant de la vigne). Pour la démonstration au stage, nous avons utilisé pour chaque bocal de 1 litre de capacité, 150 grammes de plante et 450 cc de notre alcool à 96° nécessaires pour recouvrir la plante. Si la plante avait été moulue fin, la quantité d’alcool indispensable pour la surnager aurait été moindre.
Chaque bocal [image 12] emporté par les stagiaires devra être placé en un lieu chaud à une température ne dépassant pas 60 ° C, et secoué au moins une fois par jour. Si la plante avait été en poudre très fine, il y aurait eu un risque de colmatage de la plante au fond du bocal.
      Pour une bonne extraction, il faut compter de 20 à 30 jours de macération. On peut remplacer la plante par de la nouvelle pour « charger » un peu plus l’alcool et faire un nouveau cycle de macération.
La plante, après filtrage pressage (à ce stade, un alchimiste parle de fèces) est brûlée comme indiqué plus haut pour obtenir, après plusieurs calcinations, les cendres les plus blanches possible.
Pour terminer l’élixir, ces cendres encore chaudes sont versées dans un bocal et rejointes par l’alcool chargé et filtré. Le bocal, hermétiquement fermé, est remis en digestion, comme ci-dessus, une vingtaine de jours. Le sel (contenu dans les cendres) renforce l’extrait alcoolique qui contient ainsi les trois principes. A ce stade, l’élixir est prêt à être consommé.
Dans tous les cas, l’élixir est à utiliser à très petites doses, de l’ordre de 1/2 de cuillère à café dans un verre d’eau. Bien entendu, l’élixir doit être réalisé avec la plante ayant les propriétés médicinales recherchées, et non uniquement avec le romarin qui nous a servi d’exemple.

Les Amis de l’Alchimie.